Inauguration du Patio Marion Dadikian : Un hommage émouvant à la Maison du Soldat d'Erevan

Հասարակություն
16.04.2025

Le 7 avril 2025, la Maison du Soldat d'Erevan a accueilli un événement poignant et symbolique : l'inauguration du patio dédié à Mme Marion Dadikian, décédée en juin 2023. Cet espace, désormais empreint de souvenirs et de gratitude, rend hommage à une femme dont la générosité et l'engagement envers l’Arménie étaient exceptionnels.

 

Par Paul Loussot

Depuis 2021, la famille Dadikian soutient et finance la Maison du Soldat, une institution hors du commun qui se consacre à soigner, rééduquer et accompagner les militaires arméniens handicapés et blessés au front par les attaques azerbaidjanaises des dernières années (vous pouvez retrouver un article du Courrier d'Erevan revenant plus en détail sur la Maison du Soldat ici). Leur contribution inestimable a permis de renforcer les capacités de ce centre à prodiguer des soins de qualité et un soutien indéfectible aux soldats dans le besoin. L'ambassadeur de France en Arménie, M. Olivier Decottignies, présent aux côtés de Jean Dadikian pour cette inauguration, a exprimé son émotion et son honneur de participer à cet hommage. Marion Dadikian, « Arménienne de cœur », laisse un héritage de compassion et de solidarité à ceux qui franchiront les portes de la Maison du Soldat. Ce patio, désormais baptisé en son nom, symbolise non seulement la reconnaissance pour ses actions, mais aussi l'espoir et la résilience qui animent cette institution et les soldats qu'elle soutient.

 

 

La première visite de Jean et Marion Dadikian en Arménie remonte à 2018. Lors de ce voyage, Jean et Marion furent particulièrement touchés par les enfants de l’orphelinat de Gavar. Ils décidèrent alors de participer à la rénovation de l’orphelinat, de prendre en charge des orphelins notamment en leur permettant de rejoindre des cours particuliers. Un beau succès, puisque l’un d’entre eux a même rejoint, quelques année splus tard, l’Université française en Arménie. 

Leur première visite à la Maison du Soldat fut également un choc pour le couple, ému par le courage et la résilience des soldats pris en charge. Jean Dadikian se souvient notamment avec émotion de sa rencontre avec un jeune soldat handicapé à cause de ses blessures. Cette visite émouvante a poussé le couple Dadikian à venir en aide une nouvelle fois à l’Arménie, cette fois-ci en participant au financement d’un nouvel ascenseur vers le bloc opératoire pour les soldats handicapés, ainsi qu’à la mise en place de cours de danse et de traitements pour la fertilité. Ainsi le nouveau projet du patio Marion Dadikian, outre sa symbolique importante, permettra à la Maison de Soldat de récolter des fonds, grâce au café inauguré. Un soldat en ayant la responsabilité pourra également bénéficier d’un revenu grâce à cette initiative.

Jean et Marion Dadikian sont également venus en aide auprès des Arméniens d’Artsakh déplacés de force, notamment en 2020 lors de la guerre des 44 jours. Ainsi, 75 familles ont pu être aidées grâce à leurs actions. Pendant trois ans, ils les ont accompagnées, et certaines familles ont même pu retourner à l'époque dans leurs foyers sur leurs terres... Avec émotion, Jean se souvient du choc qu’il a ressenti en voyant ces déplacés dormant à six sur un seul lit. Grâce à sa générosité, sa fondation avait pu commander une trentaine de lits pour les familles nombreuses dans le besoin. Toutes ses familles ont pu être suivies, et Jean et sa fondation sont encore en contact avec beaucoup d’entre elles.

 


Jean Dadikian 

Très récemment, Jean Dadikian s’est investi dans un nouveau projet, cette fois-ci à Kotayk. L’orphelinat de Gavar ayant été fermé, de nouvelles structures gérées par SOS Children’s Villages ont dans cette région stratégique car au centre de l’Arménie, étant également moins vulnérable. Ainsi, pour continuer de venir en aide aux enfants orphelins en Arménie, Jean a contribué à lever 300 000 euros d’aide pour construire un jardin d’enfant nécessaire au confort et à l’épanouissement de ces enfants vulnérables. 140 enfants pourront alors bénéficier de cette structure au mois d’octobre, les travaux commenceront en mai.

Jean souligne avec émotion que ces voyages récurrents en Arménie sont toujours l’occasion de venir en aide et de financer de nouveaux projets. Avec une grande modestie, il souhaite rester discret dans ses actions et souligne le bonheur que lui apporte ses différents projets dans sa patrie d’origine :

 

« Je ne viens jamais en Arménie avec des projets déjà préparés en amont. A chaque fois, c’est lorsque je vois des enfants dans de telles situations que je décide de faire quelque chose pour eux. Cela me fait tant plaisir de pouvoir les aider. »

 

Ainsi, Jean Dadikian et sa fondation ont notamment pu commander des vestes d’hiver au Noël 2024 pour 74 enfants du village particulièrement vulnérable de Tegh, situé dans le Syunik non loin de Goris, au bord de la frontière avec l’Azerbaidjan.

Dans un pays où la capitale, Erevan, concentre une grande partie des ressources et des infrastructures, les villages éloignés font souvent face à des défis considérables. En concentrant les ressources à Erevan, le pays risque de creuser davantage les inégalités régionales. En mettant l'accent sur la décentralisation, la fondation Marion Dadikian joue un rôle crucial dans le développement des villages du pays. Ces initiatives visent à créer un environnement propice au développement et à l'autonomie des communautés locales. En soutenant les régions éloignées, il est possible de créer un développement plus équilibré et inclusif. Les autorités locales et nationales doivent travailler de concert pour mettre en place plus de politiques qui favorisent cette dynamique.

 

 

Jean Dadikian est né en 1934 en France. Sa famille fut décimée durant le génocide arménien perpétué dans l’Empire Ottoman par le comité Jeunes-Turcs : « Lorsque j’étais à l’école, les grands-parents de mes camarades venaient les chercher à la sortie des cours. Moi, je n’avais pas de grands-parents. Je me posais des questions, j’étais préocuppé. » Ayant grandi dans une famille modeste, Jean hérita de la grandeur d’âme et de la générosité de son père. Son parrain, ayant une très bonne situation, répétait à Jean « ton père est un prince ». Malgré les difficultés du quotidien, le père de Jean faisait toujours tout ce qu’il pouvait pour aider les plus nécessiteux : « Nous n’avions plus d’argent le 20 du mois, mais mon père trouvait toujours comment emprunter de l’argent pour venir en aide aux plus malheureux. Et il rendait toujours cet argent ! ». En grandissant, Jean dû commencer à travailler très jeune pour subvenir aux besoins de sa famille. 

Arménien d’origine, Jean n’avait pas eu l’opportunité de visiter la nation de ses ancêtres. C’est désormais chose faite, et de la plus belle des manières.