Demain, le 21 juin, à l’occasion de la Fête de la musique, l’ambassade de France en Arménie va faire un beau cadeau aux habittants de la capitale arménienne: au Parc des Amoureux, ils vont découvrir la riche palette musicale du Dan Gharibian Trio, interprétée par Dan Gharibian, l’ex- leader du groupe Bratsch à la voix charismatique, accompagné du guitariste Benoit Convert et de l’accordéoniste Antoine Girard, musiciens de jazz manouche. A la veille du concert, Le Courrier d’Erevan vous invite à leur rencontre dans une interview exclusive.
Par Anna Baghdassarian
Une musique multiculturelle
Dan Gharibian : difficile de trouver quelqu'un qui n'aurait pas entendu sa voix rauque, charismatique et bouleversante. Ce guitariste français d’origine arménienne, barbu, aux yeux pensifs, nous embarque, à travers sa musique, dans un univers où il n’y a de la place que pour la liberté. La musique est plus puissante que la politique, les frontières et les limites. Il l’a compris très tôt : « J’avais 14 ans. J’ai découvert Django Reinhardt, un musicien tsigane en France, et je me suis dit que je veux jouer comme ça. J’ai tout de suite acheté une guitare, j’ai commencé à jouer et j’ai appris tout seul. Je me suis identifié aux tsiganes, parce que eux non plus, ils n’ont pas de pays, et je me sentais bien dans cette culture. En plus, mes grands-parents, ils écoutaient de la musique turque, kurde, grecque, tsigane », - se souvient Dan Gharibian.
Mais de là, le chemin de l’artiste vers la grande scène n'était pas évident. « On a commencé à jouer dans la rue, puis dans les cafés, puis dans les cafés plus grands, puis… dans les salles de théâtre », - nous raconte Dan Gharibian. Avec le temps, ses notes attirent des milliers de gens, et le groupe Bratsch, dont le cofondateur et le guitariste il était, devient l’une des figures emblématiques de la musique mondiale. Au bout de plus de 40 ans d’aventure et de succès dans le groupe, Dan Gharibian reprend une nouvelle route. Après sa rencontre avec deux jeunes musiciens talentueux, Benoit Convert et Antoine Girard, il décide de fonder Dan Gharibian Trio.
Multiculturelle. C’est par ce mot que Dan Gharibian caractérise leur musique. « C’est mon environnement à moi ! J'aime bien toutes les musiques du Caucase. La musique ce n’est pas la politique, ça veut dire que les Arméniens jouent un peu comme les Azéris, les Turques, les Iraniens… », - explique-t-il.
« La musique du Dan Gharibian Trio est une musique qui touche l’âme. Il y a une dimension émotionnelle très importante. Ce sont des mélodies très fortes, et même si les gens ne comprennent pas forcément les langues des chants, ça leur parle quand même. C’est ce qui est magique, je crois », - ajoute le guitariste du Dan Gharibian Trio Benoit Convert.
L’accordéoniste du trio Antoine Girard pense que la musique ne peut pas changer le monde d’un coup, mais elle peut envoyer de petites flèches aux gens, ayant un effet direct sur leur changement d’état. C’est ce que leur avait dit un jour l’un de leurs amis comédiens : « Vous les musiciens, ce n’est pas comme les comédiens. Vous n'allez pas sauver le monde, mais vous faites du bien à l’humanité ».
Dans la musique du Dan Gharibian Trio il n’y a pas de slogans. Si elle arrive à toucher les gens, c’est déjà gagné. C'est-à-dire, créer quelque chose qui aide les gens à aller un petit peu mieux - c’est pour ça que Dan Gharibian Trio fait de la musique.
Son Arménie natale
En 2006, Dan Gharibian se rend en Arménie pour un concert. Cette première visite le marque énormément. « C’était un choc. Quand je suis rentré en France, on avait un concert le lendemain avec Bratsch. Après le concert, je suis sorti faire des courses, puis je suis rentré et je ne suis plus sorti de chez moi presque une semaine. J’écoutais des CD que j’avais ramenés avec moi de là-bas. Je me sentais encore en Arménie », - se souvient le musicien.
Dan Gharibian avoue qu’il aime beaucoup la musique arménienne, et il a plusieurs musiciens de prédilection․ « Je cherche toujours de nouvelles chansons․ J’entends tout, mais je pense toujours comment je peux le faire. Je ne vais pas le faire comme ils le font tous. On va essayer de le faire d’une autre façon à nous, on va y mettre quelque chose de nous, on va le faire différemment », - dit Dan Gharibian.
L’auteur de « La Valse arménienne »
Dan Gharibian est aussi l’auteur de plusieurs chansons. « J’écris également en arménien – enfin, en arménien que je connais... Si je n’arrive pas à m’exprimer, j’écris en français. J’ai un ami qui s’appelle Gérard Papazian, qui m’aide et traduit en arménien mes pensées », - raconte le musicien.
Par ailleurs, peu nombreux sont ceux qui savent que l’auteur de « La valse arménienne » qui avait été interprétée par la Garde républicaine française aux Invalides, à l’enterrement de Charles Aznavour, est Dan Gharibian. Il l’a écrite à 30 ans : « J’ai eu la chance qu’elle soit chantée à l’enterrement d’Aznavour. On m’avait dit la veille qu’il y avait un choix entre « La valse arménienne » ou « Dlé yaman » au doudouk. Moi, je me suis dit que ça va être Dlé yaman au doudouk, parce que celle- là, on la met partout, et puis... j’étais surpris d’entendre La valse arménienne ». Evidemment, la présence de l’accent de l’interprète français a donné un charme à la chanson. Ainsi, cette interprétation est entrée au cœur de beaucoup de personnes, mais, d’après son auteur, le succès de « La valse arménienne » s’exprime tout d’abord par le fait « qu’elle parle ».
Pour entendre Dan Gharibian Trio et célébrer la Fête de la musique, rendez-vous le 21 juin 2019 dès 18h30, Amphithéâtre Boghossian du Parc des Amoureux
Entrée libre