
La prospérité de l’Arménie ne saurait se passer de citoyens impliqués, concernés et actifs.
Par Béatrice Ramos
Aujourd’hui, dans les écoles, l'éducation civique est, certes, enseignée deux fois par semaine pendant quarante-cinq minutes. Un cours trop théorique qui ne permet pas aux élèves de bien saisir les enjeux d’une participation démocratique engagée, ni de s’impliquer concrètement dans la vie citoyenne de leur communauté. Par conséquent, les jeunes ont du mal à s’exprimer, à s’engager, à créer, et à participer à des initiatives telles que des groupes d’action.
Ce déficit de participation est profond et systémique.
Responsable du développement des projets et des financements au sein de l’équipe de la Fondation humanitaire suisse KASA, Zaruhi Lavchyan perçoit ce manque de participation civique comme un danger pour le bien-vivre du pays, relevant qu’en Europe il a déjà conduit à une perte de confiance envers la politique et à un désintérêt pour la vie commune. En Arménie, les enjeux de l’éducation civique et de la participation démocratique sont d’autant plus cruciaux qu’ils s’inscrivent dans un contexte post-guerre. C’est pour cette raison qu’il est essentiel d’encourager les jeunes à s’impliquer activement grâce à une approche concrète.
Ayant ainsi identifié les limites de l’éducation civique actuelle, KASA travaille depuis plusieurs années avec des adolescents, des jeunes et des enseignants pour leur proposer des moyens de bâtir, jour après jour, une Arménie plus forte. L’équipe de Gyumri accompagne plus particulièrement les adolescents, tandis que celle d’Erevan se concentre sur les jeunes de 15 à 30 ans et sur les enseignants.
Depuis 2018, la fondation forme ces derniers et les initie à des méthodes pédagogiques et ludiques, en vue d’un accompagnement global et durable.
Ainsi, cette année encore KASA propose une série de nouveaux projets qui associent formation des enseignants, initiatives communautaires et actions créatives menées par et pour la jeunesse. Parmi ces initiatives, certaines accordent une attention particulière aux jeunes déplacés d’Artsakh, afin de préserver leur mémoire culturelle et de favoriser leur intégration citoyenne.
Les nouveaux projets :
• EDEL – Projet de soutien à l’éducation (septembre 2025 - août 2026)
Destiné aux enseignants des écoles secondaires, EDEL répond au manque d’une éducation civique réellement structurée en Arménie. Son objectif est de renforcer la qualité et la pertinence de l’enseignement civique en développant les compétences des professeurs, en proposant des outils pédagogiques innovants et en créant des espaces d’échange professionnel.
Les productions incluent des jeux de cartes et de société, des plans de cours, des ateliers et des vidéos pédagogiques, diffusés dans les écoles et lors d’événements.
• Créer pour changer (mai 2025 - mai 2026)
Jusqu’à 30 jeunes de 15 à 29 ans, dont des déplacés de l’Artsakh, participent à une formation intensive et à la co-création d’outils éducatifs interactifs (bandes dessinées, vidéos, contenus visuels). Le projet vise à stimuler l’engagement communautaire, à préserver la mémoire culturelle de l’Artsakh, à promouvoir la participation citoyenne et la sensibilisation à l’environnement, tout en aidant les jeunes déplacés à s’intégrer grâce à des initiatives créatives.
• Renforcer la résilience culturelle et l’identité à travers le patrimoine (septembre 2025 - août 2026)
Ce programme implique 30 jeunes (14–25 ans) et 20 enseignants dans dix communautés. Il cherche à préserver le patrimoine culturel immatériel (chants, danses, traditions, récits) et à consolider l’identité culturelle arménienne, tout en intégrant les jeunes et les communautés vulnérables, notamment ceux d’Artsakh.
Les résultats attendus : initiatives locales, plans de cours, guides méthodologiques et un festival final pour valoriser les productions.
• Les jeunes citoyens d’Arménie (jusqu’en 2028)
Ce vaste programme touche adolescents, jeunes adultes, enseignants et autorités locales. Il a pour ambition de renforcer la culture démocratique, d’outiller les jeunes pour qu’ils participent activement au développement de leur communauté et de favoriser la coopération entre jeunesse, écoles, société civile et pouvoirs publics, y compris dans un réseau régional Arménie–Géorgie.
Parmi les supports créés : manuel Innovarium, curriculum certifié pour clubs scolaires, kits de formation, jeux pédagogiques et modules en ligne.
Quand on parle d’éducation civique, on parle d’un processus éducatif influençant les convictions, les valeurs, l’engagement et la capacité d’action des individus en tant que membres de leur communauté.
C’est pour cette raison que l’objectif principal de KASA est de rendre la jeunesse arménienne attentive, active, loyale et dévouée au bien commun. En complément d’un système scolaire essentiellement théorique, les différents projets favorisent l’apprentissage par la pratique, en créant un pont entre savoir et compétences. C’est ainsi que chaque futur citoyen pourra comprendre qu’il a le droit de participer à la vie locale et démocratique et que son action compte.
La responsable de développement des programmes et des financements de la fondation le rappelle : « L’éducation civique est une affaire de motivation, de valeurs et de bien commun qui s’apprend et se comprend à travers l’action et la coopération ! ».