Des propriétaires de fermes piscicoles ont manifesté ce 23 novembre devant le ministère de l'Environnement contre l'adoption de mesures environnementales visant à réduire leur consommation en eau.
Par Olivier Merlet
L'assemblée nationale a approuvé le 22 novembre en deuxième lecture une série d'amendements portant sur la protection de l'environnement. Ils étaient présentés par le ministre en charge, Hakob Simidyan. Parmi ceux-ci, deux mesures importantes ont été prises concernant la protection des forêts domaniales et des zones naturelles protégées d'Arménie ainsi que la gestion des ressources en eau dans l'industrie piscicole.
Concernant la protection des zones forestières et "naturelles sensibles", le projet prévoit la fusion de l'ancien comité des Forêts "Ayantar" ("ArmForest") et des parcs nationaux d'Arménie qui s'accompagnera d'une réduction de leurs effectifs actuels. Le nouveau service devrait employer 1 176 inspecteurs et forestiers pour assurer une surveillance des forêts jour et nuit, sept jours sur sept contre seulement huit heures par jour jusqu'à maintenant. Les équipes terrain seront dotées de VTT et de véhicules automobiles 4x4 pour assurer les patrouilles ainsi que de drones de surveillance. Des systèmes modernes de détection sonore et de fumée seront également installés. Les nouvelles dispositions autorisent par ailleurs les inspecteurs à recourir à la force en cas de résistance des éventuels contrevenants.
La deuxième disposition adoptée hier par l'assemblée nationale provoque davantage de remous. Elle impose désormais aux fermes piscicoles de s'équiper de systèmes leur permettant la réutilisation de leurs eaux usées à au moins 40%, de limiter leur exploitation des nappes phréatiques et le forage de nouveaux puits.
L’activité piscicole est une grande consommatrice de la ressource en eau. Développée dans la vallée de l’Ararat depuis le début des années 2000; elle compte aujourd'hui plus de 200 fermes couvrant près de 3000 hectares pour une production de 17 à 18 000 tonnes de poisson par an dont 20 à 30% sont exportées en Russie et vers d'autres pays. Le secteur représente 20 milliards de drams de chiffre d'affaires annuel (plus de 45 millions d'euros), mais son exploitation quasi incontrôlée est régulièrement décriée par les associations environnementales depuis de nombreuses années.
L'épuisement des nappes phréatiques locales et le rejet de ses eaux usées font en effet peser de graves menaces sur les systèmes agricoles traditionnels de la région. Qui plus est, pour assurer leur approvisionnement régulier, d'importants travaux de canalisation ont été réalisés depuis le réservoir de Ketchut près de Jermuk, lui-même directement relié au lac Sevan dont le niveau ne cesse de baisser. En Juillet de cette année, le gouvernement qui tente aujourd'hui de prendre de meilleures décisions accordait le déversement de 240 millions de mètres cubes d'eau du lac en péril. Les experts estiment pourtant que la quantité maximum annuelle ne devrait pas dépasser 170 millions mètres cubes.
L'opposition a critiqué le projet de loi, affirmant que les entreprises auraient dû être prévenues à l'avance de la nécessité d'installer de tels systèmes jugés coûteux. Ce matin, 23 novembre, un groupe d'éleveurs piscicoles de la région d'Ararat manifestait devant le bâtiment qui abrite le ministère de l'Environnement. « Le ministre déclare que plus de la moitié de l'Arménie n'a pas d'eau potable, la moitié de l'Arménie vit à Erevan, est-ce qu'Erevan n'a pas d'eau potable ? Au lieu de réduire les pertes d’eau dans le réseau, et de fermer les canalisations dans les terres non réclamées, ils s'en prennent à nouveau aux fermes piscicoles. Certaines seront obligées de fermer et le volume des exportations de poisson diminuera », a déclaré l'un des manifestants.