Annoncé jeudi dernier par le journal Haykakan Jamanak, média en ligne dirigé par Anna Hakobyan, l'épouse du Premier ministre, ce qui ne semblait au départ qu'un simple fait divers est en train de prendre des proportions d'affaire d'État.
Jeudi dernier, 18 mai, Ashot Pashinyan, le fils du premier ministre acceptait de monter dans la voiture de Gayane Martirosyan, la mère d'un soldat tombé au champ d'honneur lors de la guerre des 44 jours. Celle-ci souhaitant lui parler de son fils mort au combat, Ashot Pashinyan aurait pris place dans le véhicule de son plein gré. Une fois à bord, suite à menaces ou pressentant un geste extrême à son encontre, le fils du Premier ministre aurait sauté ou aurait été expulsé de la voiture en marche: Les faits n'ont pas été clairement communiqués.
Toujours est-il que dès le lendemain, après avoir été prise de malaise et transportée à l'hôpital, la désespérée a été arrêté puis mise en détention préventive pour une durée d'un mois. Des membres d'une association de proches des soldats tués, "l'Appel des fils" dont Gayane Martirosyan fait partie, ont immédiatement réagi en organisant devant les portes du bâtiment du gouvernement, place de la République, un "sit-in" ininterrompu depuis trois jours maintenant auquel ils appellent le public à se joindre.
L' indignation a vite gagné l'opinion publique mais aussi une bonne partie de la classe politique arménienne. Dimanche 21 mai, pour la deuxième fois en quelques semaines, Levon Ter Petrosyan, le premier président de la IIIe République d'Arménie est de nouveau sorti de sa réserve de la vie politique du pays. Il a sévèrement critiqué le pouvoir en place : « La détention d'une mère qui a perdu son fils sur le champ de bataille est une plus grande honte même que l'acte dégoûtant du tristement célèbre président de l'Assemblée nationale qui a craché au visage d'un citoyen dans le centre d'Erevan en plein jour. Ces deux cas montrent que l'insolence du gouvernement n'a pas de limites. Il semble que l'apaisement de la tension politique interne en Arménie devrait être la responsabilité et la préoccupation des autorités, mais comme nous pouvons le voir, ce sont elles qui attisent encore plus la tension avec leurs actions effrontées et à courte vue. »
Dans le même temps, dans un message mettant en garde le chef du gouvernement arménien contre ses déclarations politiques clivantes vis à vis du Karabagh, Ruben Vardanyan, l'ex-ministre d'État du Haut-Karabagh a évoqué « le destin tragique et la détresse des mères » des soldats arméniens.
Ce lundi, Vazgen Manukyan, figure historique de la scène politique arménienne, demandait lui aussi la libération immédiate de Gayane Martyrosyan : « le cas fabriqué par lequel ce gouvernement a détenu cette mère privée d'enfant est un grand coup porté aux sentiments et à la dignité de notre peuple ».
Ce lundi toujours, le premier ministre a prévu de tenir une conférence de presse au cours de laquelle on s'attend à ce qu'il s'exprime sur l'affaire.